Élevé à l’école des philosophes d’Athènes, sa patrie, Saint Denis avait formé son génie naturel par l’étude des sages du paganisme. Au temps de la passion de Notre-Seigneur, il avait environ 25 ans et voyageait en Égypte avec son ami Apollophane, pour compléter son éducation. Les deux jeunes gens étaient à Héliopolis alors que la miraculeuse éclipse qui couvrit l’Orient de ténèbres annonçait à l’univers la consommation du déicide au Golgotha. Et Denis, de plus en plus dans l’admiration devant ce phénomène dont il ne pouvait pénétrer la cause, s’écria : « Ou le Dieu de la nature souffre, ou la machine du monde se détraque et va retourner dans son ancien chaos. » Paul vint à Athènes, discuta dans la synagogue avec les Juifs et les prosélytes, prêcha tous les jours sur la place publique.
En ce temps de défaillances, rien n’est plus propre à relever les courages abattus, à ranimer les âmes énervées, que le spectacle des grandes vertus pratiquées par les saints.
Quelques philosophes épicuriens et stoïciens discutèrent avec lui, mais, ne pouvant éluder par leurs subtilités la force invincible de ses arguments, ils le traînèrent à l’Aréopage pour le faire juger et condamner comme novateur. Ce fut dans cette auguste assemblée que l’apôtre fit paraître sa sagesse inspirée, et que la foi vint éclairer Saint Denis, alors aréopagite. Il renonça immédiatement aux superstitions païennes, quitta même les emplois de la vie séculière pour devenir un parfait disciple de Jésus-Christ. Après lui avoir conféré le baptême, Paul l’emmena pendant trois ans avec lui dans ses voyages, le forma aux vertus et aux travaux évangéliques, et le donna ensuite pour évêque à la chrétienté d’Athènes. Saint Denis entretint alors un saint commerce de lettres avec les plus grands hommes du christianisme naissant. Nous avons encore ses épîtres à Jean l’Évangéliste, à Polycarpe, à Timothée, à Tite et à d’autres évêques ; elles sont pleines de l’esprit de Dieu et de la science des saints. Quelques auteurs ont assuré qu’il écrivit aussi à la sainte Vierge, et qu’il eut le bonheur de la voir avec Saint Jean à Éphèse. Ce qui est plus certain, (car Saint Denis lui-même nous l’apprend dans son livre des Noms divins), c’est qu’il eut la consolation de se trouver à Jérusalem au temps de la mort de Marie. Comme les apôtres, il assista au trépas de cette Vierge immaculée ; il vit le Seigneur Jésus environné de ses anges et venant recueillir l’âme de sa Mère ; trois jours après, il constata que le tombeau de la Reine du ciel était vide, et avec les autres pontifes il célébra « la toute-puissante bonté du Seigneur. » De retour à Athènes, saint Denis s’applique avec une ardeur nouvelle à la sage conduite de son diocèse, et voyage de tous côtés pour prêcher la divine parole. À Éphèse, Jean l’Évangéliste lui représente un jour l’état déplorable des nations de l’Occident, encore plongées pour la plupart dans les ténèbres de l’idolâtrie. Quoique âgé de soixante-dix-huit ans, Denis n’hésite pas à entreprendre la mission de les évangéliser. Laissant pour son successeur à Athènes St. Publius et prenant avec lui Éleuthère et Rusticus, il vient à Rome et se présente au pape Saint Clément, qui l’envoie dans les Gaules. Paris était alors le rendez-vous des nobles Gaulois, à cause de la salubrité de l’air, des agréments du fleuve et de la richesse du sol. L’homme de Dieu le choisit pour champ de ses travaux.
Il s’y fixe avec courage, se met à prêcher avec tant de zèle et de constance, qu’il convertit bientôt un grand nombre de païens. Alors il bâtit des églises, institue des prêtres pour les desservir, et continue par ses prédications à étendre la foi du Christ. Cependant la persécution dirigée contre le christianisme par l’empereur Domitien ne se bornait plus à l’enceinte de Rome. Un édit général venait de l’étendre à toutes les provinces de l’empire. St. Denis et ses deux compagnons d’apostolat, le prêtre Rusticus et le diacre Éleuthère, furent arrêtés par ordre du préfet Sisinnius Fescenninus, et comparurent devant son tribunal. Le persécuteur les fit flageller, dans l’espoir de vaincre leur constance ; mais la force des bourreaux s’épuisa avant celle des martyrs. Sur son ordre, les trois bienheureux furent conduits hors de la cité, sur une colline dédiée à Mercure (aujourd’hui Montmartre). Là ils devaient avoir la tête tranchée. Rusticus et Éleuthère furent exécutés les premiers ; leur tête roula sur le sol à côté de leur corps inanimé. Enfin le glaive du bourreau frappa Denis, et l’on vit le corps du pontife se soulever, prendre sa tête dans ses mains et descendre ainsi la colline l’espace de deux mille pas (9 novembre 95). Fescenninus avait recommandé qu’on jetât les cadavres dans la Seine, afin de les soustraire à la vénération des fidèles.
Mais une pieuse chrétienne, nommée Catulla, parvint à tromper la vigilance des soldats. Elle fit enlever ces précieuses dépouilles, et leur donna pendant la nuit la sépulture dans un champ qui lui appartenait. Plus tard les fidèles y élevèrent une basilique en l’honneur des martyrs, et ce lieu devint célèbre par les miracles qui s’y opéraient.
Réflexion pratique — À la voix de saint Denis, ces fiers Gaulois, nos ancêtres, surent briser leurs idoles et courber la tête sous le joug du Christ. Comme eux, brisons nos idoles — les passions de notre cœur — et montrons-nous les dociles disciples de l’humble et doux Jésus.
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