Ce texte est extrait du livre : Saint Remi apôtre des Francs
La petite chapelle de Saint-Christophe, qu’un prodige désigna pour la sépulture, a fait place, dès le, VIIe siècle, à une vaste église, et au XIe les Bénédictins ont élevé la splendide basilique que l’on admire aujourd’hui. Aussitôt après la mort de saint Remi, les fidèles couvrirent des marques de leur vénération et de leur confiance la sépulture qui gardait les restes de leur puissant Protecteur ; et bientôt un mausolée, un tombeau, fut élevé pour abriter les précieuses reliques. Le tombeau actuel est le quatrième que l’on connaisse, il a été construit en 1847 et bénit par Mgr Gousset, plus tard Cardinal. Les plans dressés par M. Brunette furent exécutés par d’habiles sculpteurs comme MM. Combette et Wendling.
Le tombeau a la forme d’un rectangle allongé arrondi à l’une des extrémités ; la base est coupée dans chaque face latérale par les piédestaux des sept colonnes de marbre qui supportent l’entablement. Entre chaque colonne est creusée une niche élégante dont la voûte est cannelé en coquille ; elle reçoit la statue de l’un des anciens pairs. Les chapiteaux des colonnes, tous variés, représentent les plus beaux types de la Renaissance ; le comble en pierre figure une toiture couverte d’écaille et se termine par une crête formée de gracieuses arabesques ; du sommet de l’angle s’élance, un campanile découpé à jour. Ce qui fait la principale richesse du monument et attire surtout l’attention, ce sont les statues qui en garnissent les faces et l’extrémité ; elles ont été sauvées de l’ancien tombeau construit en 1537 par Robert de Lenoncourt.
Douze de ces statues, de grandeur naturelle (1m60) représentent les anciens Pairs, ecclésiastiques et laïcs, qui avaient le privilège de porter dans les sacres les insignes royaux. Du côté droit (sud) le premier, en partant de l’abside, est l’archevêque de Reims, consécrateur, la croix est entre ses mains ; le second est l’évêque-duc de Laon, il porte la sainte ampoule ; le troisième, l’évêque de Langres, tient le sceptre ; le quatrième, l’évêque-comte de Beauvais, porte le manteau royal ; le cinquième, l’évêque-comte de Châlons, offre l’anneau ; le sixième, l’évêque-comte de Noyon, porte le baudrier. Du côté gauche (nord), partant également de l’abside, le premier pair, le duc de Bourgogne, présente la couronne royale ; le second, le duc de Normandie, tient l’étendard ; le troisième, le duc d’Aquitaine, porte l’oriflamme ; le quatrième, le comte de Toulouse, les éperons ; le cinquième, le comte de Flandre, garde l’épée du roi ; le sixième, le comte de Champagne, tient la bannière royal. L’extrémité cintrée offre aussi un groupe remarquable, conservé également de l’ancien tombeau. Saint Remi catéchise Clovis agenouillé devant lui ; saint Thierry tient entre ses mains l’Évangile et la croix. Toujours on a admiré ces statues « dont la taille au naturel, dit D. Marlot, ravit les yeux des spectateurs, ne cédant en rien aux rares pièces de Phidias tant vantées de l’antiquité. » – « Les têtes, dit M. Sutaine, modelées avec un fini merveilleux, sont, pour nous servir d’une expression consacrée, parlantes. Celles surtout de l’archevêque de Reims, des évêques de Laon et de Noyon, et du comte de Champagne ne laissent rien à désirer ».
Les statues sont en pierre polie provenant, croit-on, des carrières de Marfaux, près de Reims. Chose étrange, l’auteur de ces chefs-d’œuvre est inconnu. Les Bénédictins qui ont écrit l’histoire de leur monastère n’en font pas mention. Une tradition, qui ne remonte guère au delà de ce siècle, les attribue à Pierre Jacques, le célèbre sculpteur rémois ; mais la date de sa mort, 1596, ne permet guère de le regarder comme l’auteur de pareilles œuvres commencées en 1533. À la façade antérieure du monument, deux colonnes jumelles portent l’entablement, au-dessus duquel deux anges tiennent un écusson aux armes de Mgr Gousset. La porte en bois sculpté à jour laisse voir la châsse renfermée, dans le tombeau. Au-dessous, une inscription gravée sur un marbre noir, rappelle les tombeaux qui ont successivement abrité les reliques de saint Remi, elle est conçue en ces termes :
Le tombeau de saint Remi, élevé primitivement en ce lieu par l’évêque Sonnace en 633, trois fois renouvelé : par l’archevêque Hincmar, en 852 ; par le cardinal Robert de Lenoncourt, abbé du monastère en 1537 ; par un pieux rémois, M. Ludinard de Vauxelles en 1803, a été reconstruit de fond en comble par la ville de Reims en 1847, Mgr Thomas Gousset occupant le siège métropolitain. Ici nous vénérons pieusement les restes mortels de saint Remi, demandant qu’avec le secours de ses prières, se raniment en nous la foi, l’espérance et la charité.
Une belle grille en fer forgé entoure et protège le tombeau. Sous la splendide abside ogivale de l’église, le monument du style de la Renaissance, s’accorde parfaitement avec la riche clôture du même genre construite au XVIIe siècle pour fermer le chœur. Des tombeaux rappelés par l’inscription, celui de Sonnace n’est connu par aucun dessin ; celui d’Hincmar était reproduit dans les tapisseries représentant la vie de saint Remi que Jean Canart avait données à l’abbaye en 1419 et qui ont péri ; l’édicule élevé par Ludinard de Vauxelles après les profanations de la Révolution, se ressentait du mauvais goût de l’époque ; c’était une rotonde formée de huit colonnes entre lesquelles on avait placé les statues des Pairs de France. Le tombeau construit par Robert de Lenoncourt a fait, pendant deux siècles et demi, l’admiration de tous et mérite d’être décrit ; ce que nous en savons ne peut que faire regretter amèrement le vandalisme de 1793 qui, en un jour, anéantit les richesses que nos pères avaient accumulées autour des reliques du Patron de la cité et de la France. Robert de Lenoncourt, qui monta sur le siège épiscopal de Châlons et reçut la pourpre cardinalice, était devenu, en 1525, abbé de Saint Remi par la résignation en sa faveur de son oncle, Robert de Lenoncourt, archevêque de Reims. Le nouvel abbé voulut donner aux reliques de l’Apôtre de la France un tombeau vraiment splendide. C’était l’époque où le style ogival à son déclin faisait place à celui de la Renaissance. Un plan fut dressé, les marbres de diverses couleurs, l’or, l’argent devaient mêler leurs richesses ; l’œuvre commencée en 1533 se poursuivit pendant quatre années et sortit en 1537 des mains des ouvriers, des sculpteurs, des orfèvres, toute brillante de beauté. Le monument formait un rectangle de 5m52 de longueur, sur 2m55 de largeur ; la hauteur était de 8m11. Il se composait de deux étages, le premier d’ordre corinthien, le second d’ordre dorique.
Sur trois degrés étaient posés les soubassements de pierre blanche, servant d’appui à 17 colonnes de jaspe rouge et blanc : six colonnes se trouvaient sur chaque face latérale ; les autres étaient aux deux extrémités. Les chapiteaux en marbre blanc étaient finement ciselés ; au-dessus régnaient un entablement et une corniche également en marbre blanc mêlé de jaspe. Les colonnes placées en avant-corps, encadraient des niches dont la partie supérieure était sculptée en forme de coquilles. Dans ces niches se dressaient les statues des douze Pairs de France ecclésiastiques et laïcs. Elles n’étaient pas placées dans le même ordre qu’elles le sont au tombeau actuel. À droite, près de la porte, se trouvaient l’archevêque, duc de Reims, consécrateur, puis les évêques de Laon, de Langres, de Beauvais et de Châlons ; du côté gauche, les ducs de Bourgogne, d’Aquitaine et de Normandie, les comtes de Champagne et de Flandre. En retour, sur la façade extrême, le sixième pair ecclésiastique, l’évêque de Noyon et le sixième pair laïc, le comte de Toulouse. Le second étage était moins long que le premier d’environ un sixième ; la façade, située à l’extrémité, contenait une niche plus grande que les autres ; là, se trouvait le beau groupe de saint Remi instruisant Clovis ; au-dessus, une corniche portait les armes de Robert de Lenoncourt. Les faces latérales étaient ornées chacune de 24 tablettes d’argent, représentant en demi-relief la vie de saint Remi ; elles avaient été conservées du tombeau précédent. Au centre du toit, sur un soubassement arrondi, de petites colonnes de marbre et de jaspe soutenaient un dôme à lanterne surmonté par une fleur de lys.
La façade antérieure du tombeau frappait par sa richesse inouïe. Deux portes correspondaient à chaque étape, étaient couvertes de lames d’or : et des roses formées par des pierres précieuses, des rubis, des saphirs, des diamants, des émeraudes les recouvraient. La porte inférieure était encadrée par deux colonnes de porphyre : outre les feuilles d’or qui la couvraient, de grosses perles orientales et des agathes représentaient des lions, des éléphants, des aigles, des tourterelles. Au milieu de toutes ces richesses, on avait conservé deux souvenirs précieux du tombeau élevé par Hincmar : c’était d’abord, une croix d’or émaillée autour de laquelle étaient fixées un grand nombre de médailles d’or antiques à l’effigie d’empereurs, d’impératrices, de rois et de reines de France. Au-dessus se trouvait une petite porte qui, en s’ouvrant, laissait voir la châsse ; cette porte était toute couverte de pierres très précieuses ; au centre brillait un morceau de cristal de roche, ciselé avec un art merveilleux ; on y avait gravé le baptême de Jésus-Christ par saint Jean. Pour voir cet objet d’art, il fallait mettre une bougie allumée dans l’intérieur du tombeau, la lumière donnait au cristal la transparence nécessaire pour qu’on en pût admirer les détails. Autour de la porte, sur une bordure d’émail violet, étaient gravés les vers suivants :
Hoc tibi, Remigi, fabricavit magne, sepulchrum
Hincmarus praesul, ductus amore tuo.
Ut requiem Dominus tribuat mihi, sancte, precatu
Et dignis meritis, mi venerande, tuis.
Au-dessus de la porte supérieure, un bas-relief représentait le baptême de Clovis et dans le fronton étaient sculptées les armes de François 1er, soutenue par deux salamandres. Ce splendide monument n’a pas trouvé grâce devant les vandales de 1793 ; seules les statues ont échappé à leurs coups. Du moins, en dépit de leurs profanations, le plus précieux trésor nous reste, le corps glorieux de l’Apôtre des Francs.
Les rémois, qui ont abrité le corp de saint Remi sous de magnifiques tombeaux, ne pouvaient manquer de renfermer ses reliques dans des châsses dignes d’un pareil trésor. Sans parler des cercueils primitifs qui continrent le corps du saint évêque, la première châsse connue est celle que fit construire Hincmar en 852. La forme en était très simple, le bois qui la composait était recouvert de lames d’argent et de pierreries ; douze statues d’archevêques en ornaient les parois. Cette châsse, successivement décorée par la piété des fidèles, subsista jusqu’au milieu du XVIIe siècle ; alors elle se trouvait bien démodée et brisée en plusieurs endroits. Le grand prieur de l’abbaye, Dom Oudard Bourgeois, voulut la remplacer par une autre beaucoup plus riche, un homme prudent, il mûrit son projet, prépara les ressources nécessaires et, en 1643, il se trouva prêt à réaliser son dessein. Quelle forme allait-il donner au nouveau reliquaire ? Il avait sous les yeux le splendide tombeau élevé par Robert de Lenoncourt, il ne crut pas pouvoir trouver un modèle plus parfait.
Dom Oudard Bourgeois s’adressa à un orfèvre rémois, Antoine Lespicier, dont il avait déjà pu apprécier le talent ; le traité fut conclu : l’or, l’argent, les pierreries de la châsse d’Hincmar devaient être utilisés.
En 1649, l’oeuvre était terminée ; la dépense s’élevait à 14/143 livres. De son travail, Antoine Lespicier recueillit plus de gloire que de profit. Dom Chastelain décrit ainsi le splendide reliquaire :
« Cette châsse est toute d’argent, faite dans le même goût que le mausolée, excepté que les colonnes qui séparent les figures des douze Pairs de France sont torses et ornées de feuillages délicatement travaillés. Elle est longue de sept pieds deux pouces ; haute de près de cinq pieds, y compris une grande couronne d’argent qui se met dessus quand on la tire dehors ; elle est large de deux pieds et demi. Au lieu de par devant, c’est un tableau d’argent chargé de pierres précieuses, lequel représente saint Remi baptisant le roi Clovis ; on y a employé 246 marcs d’argent. On y voyait attachés de presque tous les côtés quantité de joyaux qui sont des preuves assurées de la libéralité de plusieurs personnes de Reims, tant ecclésiastiques que séculiers ».
La translation du corps de saint Remi dans la nouvelle châsse se fit au mois d’août 1650. Le reliquaire d’Oudard Bourgeois eut à peine un siècle et demi d’existence. Des jours mauvais vinrent pour la France ; le 23 octobre 1793, un membre du district dépouilla la châsse de saint Remi des plaques d’argent, de l’or, des pierreries ; et la foule en délire la brisa et profana les restes de l’Apôtre des Francs. Ce n’est pas ici le lieu de raconter comment ces précieux ossements furent jetés dans une fosse du nouveau cimetière, exhumés vingt-et-un mois après et renfermés provisoirement dans une modeste châsse de bois d’or.
Dès que le calme reparut, M. Ludinart de Vauxelles, tandis qu’il réédifiait le tombeau dans l’église de Saint Remi, songeait aussi à refaire une châsse plus digne pour recueillir les reliques.
C’est la châsse actuelle. Elle a été fondue et décorée de 1806 à 1810 par François-Louis Braquehaye, fondeur, doreur et argenteur à Reims, moyennant le prix de 1800 francs. Bien qu’elle eût été transporté à Saint Remi dès le 9 octobre 1810, elle ne reçut les reliques que le 17 décembre 1824, par la translation que fit Mgr de Latil, archevêque de Reims. La châsse est en cuivre argenté ; à l’entour on a placé, non plus les Pairs de France, mais les douze Apôtres ; ni la forme, ni la matière n’ont rien de recommandable, et déjà, après quatre-vingts ans seulement, les ornements se détachent. L’année 1896, avec le glorieux centenaire qu’elle ramène, semblait offrir l’occasion la plus favorable de donner un reliquaire plus digne à l’Apôtre de la France. Au mois d’avril 1895, M. l’abbé Baye, le zélé curé de Saint-Remi, faisait appel à la générosité des fidèles, et bientôt il commençait la réalisation de son projet. Encore une fois c’est un rémois qui aura la gloire d’exécuter le reliquaire de Saint Remi. L’œuvre a été confiée à M. Ch. Wery-Mennesson, ciseleur et graveur, dont le talent et la compétence sont irrécusables pour un travail de ce genre. La nouvelle châsse, sans égaler la splendeur de celle de dom Oudard Bourgeois, la fera cependant revivre sous nos yeux ; elle en reproduira le style, les colonnes, les niches abritant les Apôtres à la place de celles des Pairs, le double étage, les galeries ajourées ; des émaux retraceront les principaux faits de la vie de saint Remi : la bataille de Tolbiac, le baptême de Clovis. Telle est l’œuvre qui s’élabore ; elle sera digne de la piété des Rémois et des pèlerins de la France entière, digne du grand saint, l’une des plus pures gloires de notre patrie et son puissant protecteur.
Apprenez, mon fils, disait saint Remi à Clovis, la veille de son baptême, « que le royaume de France, est prédestiné par Dieu à la défense de l’Église romaine, qui est la seule véritable église de Jésus-Christ. Ce royaume sera un jour grand entre tous les royaumes de la terre ; il embrassera toutes les limites de l’empire
Et bien juste pour vous dire que vous faites un travail formidable, saint, j’ai même envie de dire. Je n’ai pour l’instant que deux livres de votre collection mais je compte bien en ajouter d’autres prochainement. Merci car je peux, grâce à vous, approfondir sérieusement mes connaissances avec des livres toutefois très accessibles.
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impeccable pour nos jeunes à qui l’éducation nationale supprime des pans entiers de notre histoire.
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