
Biographie de Rutebeuf
Le célèbre poète français Rutebeuf, né en 1245, et dont le surnom vient probablement de “bœuf vigoureux” utilisé dans un de ses poèmes, est originaire de Champagne. Il existe très peu d’informations sur sa vie si ce n’est le fait qu’il ait été jongleur et sa connaissance du latin laisse à penser qu’il eut également une formation de clerc. Son art littéraire contraste un peu avec ce qui se faisait de son temps. Il s’écarte quelque peu de la poésie courtoise des trouvères (poète et jongleur de la France du Nord, de langue d’oïl), pour s’adonner à des hagiographies, du théâtre ou encore des poèmes satiriques envers les puissants. Le genre satirique était une forme vivante au Moyen Âge. La poésie de Rutebeuf est une poésie qui parle du quotidien de l’homme médiéval. Elle peut prêcher la croisade, tout en dénonçant la mollesse des chevaliers, la simonie des prêtres, ou encore l’inconstance des puissants.
Le poète médiéval, dont fut Rutebeuf, ne défend pas une cause particulière mais aime à dénoncer tantôt le religieux, tantôt l’Université de Paris, tantôt les jeux de dés et les filles ou encore Louis IX qu’il juge parfois excessif. Il est, en quelque sorte, le thermomètre de son temps.
La culture populaire contemporaine s’est réappropriée l’œuvre du poète Rutebeuf. Le chanteur Léo Ferré a édité une chanson intitulée Pauvre Rutebeuf.
Une douzaine de manuscrits du poète médiéval ont traversé l’histoire pour nous parvenir aujourd’hui. Nous possédons pas moins de cinquante-six de ses poèmes. Tous traitent des événements et des institutions du XIIIe siècle.
La voie de Tunis
Saint Louis et ses fils se sont croisés le 25 mars 1267, et la roi de Navarre, son gendre, le 5 juin. Le poème a été écrit après cette date et avant le départ de la croisade en mars 1270. Il est très probable que sa composition remonte à l’année 1267 même, au moment où l’événement était encore dans sa nouveauté et où le faste de la journée du 5 juin, au cours de laquelle le roi de Navarre avait pris la croix et son fils aîné avait été armé chevalier , n’avait pas fini de frapper les esprits. Au v.61, Rutebeuf oublie curieusement le troisième fils du roi, Pierre, futur comte d’Alençon, qui avait pourtant pris la croix en même temps que son père et ses frères. Ce qu’il n’oublie pas, en revanche, c’est de se rappeler au bon souvenir des princes, dont il estime les générosités à son endroit insuffisantes (v. 65-66).

Le dit de la croisade de Tunis
– 1 –
Colère, tourments, pleurs et pitié :
Voilà tout le sujet de mon poème.
Qui n’éprouve pas de pitié a bien rejeté Dieu
il ne doit trouver en Dieu amour ni amitié.
-2-
Évangélistes, apôtres, martyrs et confesseurs
souffrirent pour Jésus-Christ le pressoir de la mort ;
prenez donc bien garde, vous leurs successeurs,
qu’on n’obtienne pas le paradis sans de nombreux tourments.
-3-
Nul n’entra jamais au paradis sinon par la souffrance ;
c’est donc un pauvre fou que celui qui pour son âme ne souffre pas.
Pensez-vous que Jésus-Christ nous mènera au paradis
pour avoir nourri dans les délices la chair malsaine ?
-4-
Malsaine, elle l’est, de cela je ne doute pas :
tantôt chaude, tantôt froide ; tantôt plaisante, tantôt douloureuse ;
jamais elle ne sera stable ni en repos.
Qui sert Dieu avec cette chair, guide-t-il bien son âme ?
Etc.
Les principales œuvres de Rutebeuf
- La Vie de sainte Marie l’Égyptienne. La Vie de sainte Élysabel. Le Dit de Nostre Dame. Ave Maria.
- Des règles (1259).
- Le Dit de sainte Église (1259).
- Des Jacobins (1263). La Chanson des ordres. Des Béguines.
- La Voie de Paradis (1265). Renart le Bestourné.
- La Discorde de l’Université de Paris et des Jacobins (1254).
- Le Dit de Guillaume de Saint-Amour. La Complainte Guillaume. Le Dit de l’Université de Paris. Du pharisien (1259).
- La Complainte d’outre-mer. La Chanson de Pouille (1264).
- Le Dit de Pouille. La Voie de Tunes (1267).
- La Disputaison du Croisé et du Décroisé (1268).
- La Complainte du comte de Nevers (1266).
- La Complainte du roi de Navarre (1271).
- La Complainte du comte de Poitiers (1271).
- La Griesche d’hiver. La Griesche d’été. Le Dit des ribauds de Grève. Le Mariage Rutebeuf. La Complainte Rutebeuf. La Paix Rutebeuf. La Povreté Rutebeuf. La Mort Rutebeuf.
- Le Miracle de Théophile. Le Dit de l’Herberie.
- La Disputaison de Charlot et du barbier. La Dame qui fit trois tours autour du moutier.