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Fondé par des ermites en Palestine à la fin du XIIe siècle, l’ordre religieux du Mont Carmel connut une profonde réforme en 1562 en Espagne à l’initiative de sainte Thérèse d’Avila. Le cardinal Pierre de Bérulle fonda le premier carmel réformé en France en 1604. Le carmel qui nous intéresse aujourd’hui, celui de Compiègne, est lui fondé le 21 avril 1641. L’ordre aura, tout au long de son histoire, le soutien sans faille des souverains français et plus particulièrement des reines de France. Jusqu’au jour où, la folie Révolutionnaire, en décida autrement. Connaissez-vous l’histoire des carmélites martyres de Compiègne ? Non ? Je vous explique.
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A peine la Révolution fut-elle engagée que les ordres religieux furent inquiétés. Le 13 février 1790, les révolutionnaires ordonnèrent la dissolution de tous les ordres monastiques et de toutes les congrégations religieuses régulières. Les vœux prononcés par les sœurs sont donc déclarés nuls, par conséquent tous les religieux sont invités à rentrer chez eux. Les congrégations séculières sont, quant à elles, dissoutes le 18 août 1792. Les bâtiments seront vendus pour financer les dépenses publiques. Le 14 septembre de la même année, les seize carmélites de Compiègne et leur novice sont expulsées de leur couvent par les révolutionnaires. Elles, qui vivaient en communauté, se retrouvent désormais divisées et dispersées aux quatre coins de la ville accueillis par de pieuses familles. Elles réussiront malgré tout à assister à la messe dans l’église Saint-Antoine de Compiègne en toute discrétion. Déjà en décembre 1789, sœur Constance de Jésus, alors simple novice au carmel, ne put prononcer ses vœux car la loi du 29 octobre 1789 le lui interdisait. Fin 1793, la pratique du culte catholique devient de plus en plus compliquée partout en France.
Revenons un peu en arrière. À la fin du XVIIe siècle, en 1693, une carmélite de Compiègne, sœur Élisabeth-Baptiste, avait vu en songe toutes les religieuses de son couvent dans la gloire du Ciel, revêtues de leur manteau blanc et tenant une palme à la main, signe du martyre chez les chrétiens. Un siècle plus tard donc, en septembre 1792, la mère prieure, Mère Thérèse de Saint-Augustin, dans un contexte plus que dangereux pour les catholiques, sentait les sœurs désireuses d’accéder au martyre. Elle leur proposa alors de faire un acte de consécration dont voici les termes :
« la communauté s’offrirait en holocauste pour apaiser la colère de Dieu et pour que cette divine paix que son cher Fils était venu apporter au monde fût rendue à l’Église et à l’État ».
Deux ans plus tard, en 1794, le songe allait devenir réalité. Le comité révolutionnaire durcit la répression envers la foi catholique. Les couvents furent perquisitionnés dont celui des religieuses de Compiègne le 21 juin 1794. Des lettres hostiles à la Révolution, un portrait de Louis XVI et une image du sacré cœur, emblème des vendéens, furent trouvés dans le couvent. Il n’en fallait pas plus, les seize carmélites de Compiègne sont arrêtées les 22 et 23 juin 1794 accusées d’atteinte à la sûreté de l’État, de participation à un complot royaliste et de fanatisme religieux. Le 12 juillet, elles sont transférées de Compiègne à la Conciergerie à Paris. Elles profitent de leur incarcération pour chanter les offices. Un témoin des faits dit « qu’on les entendait toutes les nuits, à deux heures du matin, récitant leur office.”
La date de leur jugement est arrêtée au 17 juillet 1794.
La sentence était connue d’avance car l’acte de condamnation avait été imprimé avant la tenue du procès et les religieuses n’eurent pas droit à un avocat, conformément à la loi en vigueur. Quand on les accuse d’avoir « caché des armes » destinées aux contre-révolutionnaires, Mère Thérèse de Saint-Augustin saisit sa croix de profession et s’écrie :
« Voilà nos seules armes ! »
Quand Fouquier-Tinville les qualifia de « fanatiques », sœur Marie-Henriette lui rétorqua :
« Citoyen, qu’entends-tu par ce mot ? » et il lui répondit : « Votre attachement à vos sottes croyances ! » « Ah, mes sœurs, quel bonheur ! Nous mourons pour la foi ! ».
Sans surprise, elles furent condamnées à mort. A 18h00, sur le chemin qui les emmenait à la guillotine, dans la charrette, elles chantaient le Salve Regina, le Veni Creator et le Te Deum. Le population parisienne, qui habituellement témoignait sa haine au passage des condamnés, fut exceptionnellement silencieuse quand les prières des agonisants et l’office des morts furent récités. Certains pleuraient quand d’autres essayaient de toucher les martyres. “Elles avaient l’air d’aller à la noce” dit un employé de la prison. Sœur Constance de Jésus, la novice, celle qui n’avait pu prononcer ses vœux à cause de la loi Révolutionnaire, dit à la mère prieure d’une voix troublée :
« Ma Mère, je n’ai pas achevé la récitation de l’office ! » « Vous l’achèverez au Ciel, ma fille ».
À 20 h, sœur Constance de Jésus s’agenouille devant la mère supérieure et lui demanda la permission de mourir. Mère Thérèse, lui tend la statuette de la sainte vierge pour qu’elle la baisa dévotement, lui dit :
« Allez, ma fille ! »
La mère supérieure mourut la dernière en donnant la bénédiction à ses sœurs.
Elle offrit un sourire aux bourreaux :
« Comment en vouloir à ces pauvres malheureux qui nous ouvrent les portes du Ciel ? Je vous pardonne de tout mon cœur comme je souhaite que Dieu me pardonne ! »
Elles furent guillotinées le 17 juillet 1794. Leurs corps et leurs têtes seront jetés de nuit dans l’une des deux fosses communes du cimetière de Picpus. Les carmélites de Compiègne ne furent pas les seules religieuses à subir le joug révolutionnaire, des religieuses d’Orange ou d’Arras connurent le même sort tragique.
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