Bonjour, depuis le début du XIIIe siècle, l’hérésie cathare faisait rage dans le Midi du royaume. Après une croisade éreintante menée par l’Eglise, le roi et les barons français, une poignée d’hérétiques refusaient de se soumettre et se réfugiait à Montségur, forteresse perchée en haut d’une montagne. L’évêque cathare Guilhabert de Castres avait dit vouloir faire de Montségur “le siège et la tête de l’Église cathare”. Pour en finir avec l’hérésie, le concile de Béziers avait décidé de la frapper à la tête. Le 14 mars 1241, à Montargis, Louis IX avait fait jurer à Raymond VII, le comte de Toulouse, de détruire Montségur dès qu’il pourrait s’en emparer mais ce ne sont pas les quelques chevaliers qu’il fit mettre au pied du castrum, feignant d’y mettre le siège, qui allaient emporter la chute de Montségur ; sa mauvaise volonté était patente. Le représentant de la Couronne, Hugues d’Arcis, sénéchal de Carcassonne, prit les choses en main. La mobilisation générale fut proclamée ; les vassaux et arrière-vassaux de la couronne étaient sollicités. Un franciscain d’Auvillar avait, de son côté, appelé tous les volontaires à se croiser. Tous les villages des environs de Montségur étaient soulevés et une centaine d’hommes vaillants s’était porté volontaire. Savez-vous comment est tombé Montségur ? Non, je vous explique.
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Pendant que le siège se mettait en place, la vie à Montségur suivait son cours ; hérétiques et simples croyants se côtoyaient. Une centaine de personnes, militaires et civiles, y vivait sous l’autorité du clan des seigneurs Péreille et Mirepoix. Pendant les années qui ont précédé le siège, les paysans, les marchands et les artisans des environs ravitaillaient régulièrement le castrum de Montségur, alors même que l’Église l’avait formellement interdit. Mais à partir du printemps 1243, les producteurs n’osaient plus se présenter devant la forteresse. Les habitants de Montségur pouvaient cependant compter sur leur importante réserve, accumulée au fil du temps, pour faire face aux Français du nord.
Face à cet imposant rocher, Hugues d’Arcis ne pouvait le ceindre parfaitement ; il était résolu à ne placer que des postes de garde autour de l’édifice. Deux stratégies s’offraient au sénéchal ; soit lancer un assaut, l’opération au vu du lieu s’avérait terriblement complexe, soit mettre le siège, mais comment connaître l’ampleur des réserves du castrum ! Sans réserve de nourriture et d’eau suffisante, Montségur tomberait avant l’hiver aux mains des croisés ; les co-seigneurs du château le savaient bien, mais comme leurs réserves étaient pleines, ils se savaient apte à tenir jusqu’à l’hiver. Pierre-Roger de Mirepoix, profitant du calme provisoire, envoya un sergent s’enquérir du soutien de Raymond VII. Le comte demanda aux assiégés, par l’entremise du sergent, de tenir jusqu’à Noël, date à partir de laquelle il pourra leur prêter main forte. Hugues d’Arcis, voyant l’hiver approcher à grands pas, entreprit un assaut, espérant ainsi se rendre maître de la forteresse. Le terrain était tellement accidenté et pentu que les affrontements étaient finalement peu nombreux ; seules les catapultes, présentes dans les deux camps, expulsaient d’énormes boulets de part et d’autre. Pendant que les combats faisaient rage, Bertrand Marty, l’évêque cathare ayant succédé à Guilhabert de Castres, entreprit de mettre le trésor de leur communauté à l’abri. L’or, l’argent, et une grande quantité de monnaie, fruit du travail des hérétiques du lieu ainsi que des dons et des legs, furent confiés à des hommes de confiance. Le trésor put être caché dans une grotte fortifiée du comté de Foix. Dans les premiers mois de l’année 1244, les Français, aidés de Gascons, se jetèrent à l’assaut du castrum à l’aide d’échelles mais un guetteur cathare sonna l’alerte ; l’assaut fut repoussé sans trop de difficulté. Courant février, des hommes et des armes avaient réussi à passer, déjouant ainsi la surveillance des croisés. Les sergents rentraient avec la confirmation que le prince toulousain viendrait leur prêter main forte d’ici avril avec les renforts de l’empereur du saint empire romain germanique. Les assiégés, submergés par les attaques de boulets détruisant sur son passage les habitations, devaient être présents sur tous les fronts.
Le 2 mars 1244, acculés, Pierre-Roger de Mirepoix et Bertrand Marty demandèrent à parlementer avec le sénéchal du roi de France. Les deux dignitaires cathares exposèrent leurs conditions : une trêve de quinze jours avant de livrer le castrum à l’Eglise et au roi ainsi qu’une amnistie générale pour les meurtres des religieux d’Avignonet. Les vainqueurs ajoutèrent d’autres conditions à celles proposées par les vaincus : Pierre-Roger de Mirepoix devra livrer des otages, les hérétiques seront livrés à l’Église et ceux qui refuseront d’abjurer seront livrés aux flammes. Les résidents du castrum non ouvertement cathares, seraient cependant interrogés par les inquisiteurs. Les hérétiques les plus zélés se préparaient à la mort. Le 16 mars 1244, les quinze jours de trêve étaient écoulés, Hugues d’Arcy entra en vainqueur dans le castrum au nom du roi de France. L’archevêque Pierre Amiel, au nom de l’Église, s’avança, regroupa les hérétiques notoires d’un côté et les simples croyants de l’autre, puis demanda au premier groupe d’abjurer et de se convertir à la foi catholique. Aucun ne se soumit. Deux cent vingt-quatre hérétiques furent alors jetés aux flammes au pied de la montagne. Quant aux simples croyants, ils n’eurent que des peines légères ; et les deux seigneurs, Pierre-Roger de Mirepoix et Raymond de Péreille, ainsi que leurs soldats, purent se retirer sans être inquiétés.
La forteresse de Montségur fut remise à Guy II de Lévis, seigneur de Mirepoix, après que celui-ci prêta hommage au roi Louis IX à Paris en juillet 1245. Conformément à la législation canonique, toutes les maisons où avaient vécu et prêché les hérétiques furent rasées, transformant le haut lieu de la résistance cathare en véritable champ de ruine, habité dorénavant par des aigles et des oiseaux.