LE SIÈCLE CHRÉTIEN (1230/1234) – Mariage de Louis IX / création de l’Inquisition

Louis IX s’émancipe de la tutelle de Blanche de Castille

Bonjour, entrons encore un peu plus dans le règne de Louis IX. Roi de France depuis quatre ans, aidé dans sa tâche par sa très influente mère Blanche de Castille, Louis poursuit sa lutte contre les barons indomptables, particulièrement contre le plus insoumis d’entre eux ; le duc de Bretagne. Louis IX, qui va bientôt s’émanciper de sa mère, devient progressivement un roi au pouvoir indiscuté. Mais avant cela, il va devoir montrer à ceux qui contestent encore son autorité, qu’il peut être ce roi vaillant ne reculant devant aucune bataille. Les barons rebelles vont petit à petit et avec peine se soumettre à la couronne. Le pape, de son côté, installe une juridiction spéciale sur les terres chrétiennes dans le but de combattre les hérésies de toutes sortes. C’est cette histoire que je vais vous raconter, notre histoire. 

L’alliance entre le duc de Bretagne et le roi d’Angleterre.

Le roi d’Angleterre, Henri III Plantagenêt, voulait coûte que coûte récupérer les anciennes possessions continentales anglaises. Pour cela, il était prêt à toutes les alliances. Les barons anglais débarquèrent à Saint Malo le 3 mai 1230 avec leur roi. Les seigneurs qui avaient débarqué dans d’autres ports bretons se réunirent tous auprès d’Henri III à Nantes. Pierre Mauclerc, le duc de Bretagne, le reçut d’une manière fastueuse. Blanche de Castille, la reine-mère et son fils Louis IX, ne comptaient pas en rester là. Le roi de France réunit l’ost royale à Angers et s’en alla jusqu’à Ancenis où il somma le duc de Bretagne de se présenter pour y être jugé comme félon. A défaut de réponses, Louis IX, accompagnés de ses barons et chevaliers, s’accordèrent à signer une sentence par laquelle Pierre Mauclerc était privé de son fieſ de Bretagne. Quelques seigneurs, une fois la durée de service militaire achevée, quittèrent le camp royal pour s’en aller en Champagne pour en découdre avec Thibaut, le comte de Champagne. Les griefs des barons à l’égard de Thibaut remontaient à l’époque du roi Louis VIII. Le comte de Champagne avait, selon les dires des barons, déserté l’ost royal lors de l’expédition du roi en pays cathare. Blanche de Castille avait conscience de toutes ces discordes. Thibaud subissait les attaques de toutes parts : par le duc de Bourgogne, les comtes de Boulogne, de Dreux, de Mâcon, de Saint-Paul et de Bar ; par Enguerrand de Coucy, Robert de Courtenay, etc. Thibaud de Champagne fut contraint de trouver un refuge à Paris. Les barons profitèrent de son absence pour ravager les villes et les villages de Champagne. Avec l’assentiment de Blanche et de Louis IX, dans le but d’apaiser les tensions, Thibaud accepta de se rendre en Terre sainte avec cent chevaliers. Les barons devront quant à eux observer les privilèges et les droits du royaume. La pacification fut jurée au mois de septembre 1230. 

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    En Bretagne, les deux armées, celle de Louis IX et celle de Henri III, malgré leur extrême proximité, évitèrent l’affrontement. Le roi d’Angleterre, malgré les propositions des barons normands l’invitant à récupérer les terres normandes héritées de ses pères, quitta le territoire, mis les voiles vers l’Angleterre et arriva à Portsmouth le 26 octobre 1230. Il laissa cependant cinq cents chevaliers et mille sergents d’armes à Pierre Mauclerc pour l’aider dans son combat contre le roi de France. Blanche de Castille et Louis IX devaient user de subtiles stratagèmes pour en venir à bout du comte breton. Plutôt que de l’affronter frontalement, elle entama des négociations avec les principaux seigneurs bretons vassaux de Mauclerc. L’entreprise réussit si bien que les seigneurs André de Vitré, Raoul de Fougères, Geoffroi de Châteaubriant, firent hommage au roi de France. La situation du comte de Bretagne devenait intenable car il devait concilier avec les deux couronnes. Les envoyés de France et d’Angleterre se retrouvèrent à Saint-Aubin du Cormier près de Rennes dans le but de mettre fin aux hostilités. Une trêve fut signée le 4 juillet 1231 ; elle devait expirer au bout de trois ans.

    Les privilèges de l’Université de Paris 

    Le 13 avril 1231, le très lettré pape Grégoire IX, accorde, en réaction aux émeutes et aux grèves des professeurs et des étudiants de 1229, des privilèges à l’Université de Paris. La bulle Parens scientiarum lui octroie une indépendance intellectuelle et juridique. L’évêque de Paris sera responsable de l’ordre public dans l’université, par conséquent, les autorités municipales n’auront pas voix au chapitre. L’université de Paris réglera elle-même l’enseignement et l’attribution des grades, comme les licences.

    La création de l’Inquisition

    Dès le XIIe siècle, les papes Innocent II, Lucius III ou encore Innocent III avaient jeté les bases d’une juridiction spéciale dédiée à purger les hérésies. Le mot « inquisition » (du latin inquisitio, « enquête ») provoque chez nos contemporains une réaction allergique alors que ce terme ne désigne qu’une technique judiciaire. Pour la société médiévale, le christianisme structure l’ordre social, par conséquent l’hérétique est considéré comme un fauteur de trouble mettant en danger l’ordre social qu’il faut donc réprimer. Après le Traité de Meaux-Paris, qui mettait fin à la croisade albigeoise, le concile de Toulouse, la même année, mit en place pour la première fois l’Inquisition dans le Languedoc dans le but de rechercher et de punir les hérétiques cathares. Le pape Grégoire IX, le 11 octobre 1231, confia aux ordres Mendiants (Dominicains et Franciscains) le soin d’enquêter et de ramener les hérétiques à la vraie foi. De par leur style de vie (piété, pauvreté), ils semblaient être les plus à même de convertir les cathares. Auparavant, cette mission avait été confiée aux évêques. Contrairement aux idées reçues, les inquisiteurs médiévaux, qu’il ne faut pas confondre avec les inquisiteurs espagnols, portugais ou romains du début de la Renaissance, appliquaient essentiellement des peines spirituelles comme la prière, la pénitence ou alors de simples amendes. Pour les plus téméraires, cela pouvait aller de la confiscation des biens et jusqu’à la peine de mort en ultime recours pour les apostats et les relaps. L’Inquisition fut officiellement créée en avril 1233 par la bulle Ille humani generis du pape Grégoire IX. Le 13 avril de la même année, le pape nomme les premiers inquisiteurs au royaume de France parmi les dominicains et les franciscains. L’ancien cathare devenu dominicain Robert le Bougre est nommé inquisiteur en Bourgogne. L’Inquisition s’étend désormais à tout le royaume de France.

    L’inquisition nouvellement installée et répandue à travers le royaume œuvrait à éradiquer l’hérésie cathare. L’institution pouvait également être utilisée dans le but de combattre d’autres hérésies ou sectes. Comme vous l’avez compris, le but était de maintenir l’ordre social autour du catholicisme. C’est dans ce contexte que dans le Midi du royaume, l’Inquisition fut sollicitée pour dénoncer les écrits de Moïse Maïmonide, un rabbin du XIIe siècle considéré comme une autorité juive médiévale. En cette fin d’année 1233, les livres de Maïmonide, dont le célèbre “Guide des Égarés”, furent brûlés par l’Inquisition.

    Le mariage de Louis IX

    En mai 1234, le roi de France Louis IX vient d’avoir vingt ans. Il est temps de lui trouver une épouse. Le comte de Provence, Raymond-Bérenger IV a quatre filles, dont l’une Marguerite, âgée de seulement treize ans, semble remplir toutes les conditions. Déjà, en 1233, Louis IX, qui avait eu vent des qualités de la jeune fille, avait demandé au chevalier Gilles de Flagy, de se rendre à la cour comtale de Provence pour en savoir plus sur Marguerite. Jean de Nesle, Gauthier Cornut et Maurice de Sully sont alors désignés comme négociateurs du contrat de mariage. Le 30 avril 1234, les deux parties se mettent d’accord. Le roi s’engage à épouser Marguerite de Provence avant l’Ascension. Le 27 mai 1234, Louis IX et Marguerite de Provence se marient en la cathédrale de Sens, par l’archevêque Gauthier le Cornu. Tous les grands personnages du Royaume participent à la noce, le jour est à la fête. Le lendemain, le 28 mai 1234, la toute jeune Marguerite est couronnée reine de France. 

    Les derniers soubresauts bretons

    La mariage venait tout juste d’être célébré que le roi Louis IX dut marcher vers la Bretagne hostile. La trêve avec le roi d’Angleterre Henri III et Pierre Mauclerc le duc de Bretagne, expirait en juillet 1234. Le roi de France entra avec son ost royale sur les terres bretonnes. Mauclerc demanda au roi une trêve jusqu’à la Toussaint et promit de devenir “l’homme du roi”. Le breton était perfide puisqu’en réalité Mauclerc attendait une intervention du roi d’Angleterre. Sauf qu’Henri III était trop occupé avec ses prélats et ses barons. Henri ne put rien pour Mauclerc. Acculé, le duc de Bretagne rendit son hommage-lige au roi de France, lui livra trois châteaux en Bretagne, et renonça aux fiefs qu’il possédait hors de ce duché. Sa soumission était véritable. Enfin. La croisade des barons, lancée à la fin de la décennie, permit à ses preux chevaliers de mettre leur énergie au service d’une noble cause et ainsi permettre au royaume de France de jouir d’une tranquillité momentanée.

    Louis IX avait enfin réussi à pacifier son royaume. Les principaux barons, fraîchement soumis, pourront bientôt utiliser leur fougue et leur bravoure pour défendre la plus noble des causes : la Terre sainte. Tout comme Louis IX qui mettra sa fonction au service de la Croix. Les années qui s’annoncent vont porter le roi de France au sommet de la chrétienté médiévale. Mais ça, ce sera pour les prochains épisodes. Bonne journée et à bientôt.