L’ORDONNANCE de VILLERS-COTTERÊTS – 1539

Bonjour, je vous emmène aujourd’hui au XVIe siècle, nous sommes sous le règne de François Ier. Jusqu’à cette année de 1539, au royaume de France, les actes notariés, administratifs et de justices étaient tous rédigés en latin, la langue des personnes instruites et de l’Église. Pour unifier linguistiquement le royaume, qui avait la particularité  de parler diverses langues selon les régions, le roi de France signe entre le 10 et le 25 août 1539 dans le château royal de Villers-Cotterêts l’ordonnance du même nom. Savez-vous quelles ont été les conséquences de cette ordonnance et ce qu’elle contient ? Non, je vous explique.

Mais avant de vous raconter cette histoire, notre histoire, je veux vous dire que vous pouvez soutenir mon travail sur l’histoire de France en commandant un livre de ma maison d’édition ou en faisant simplement un don, pour en savoir plus, cliquez sur les liens en description de cette vidéo. Merci.

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    Depuis le XIIIe siècle, il existait déjà une volonté, de la part du pouvoir monarchique, de diffuser la langue d’oïl dans l’administration. La langue d’oïl était celle que l’on parlait dans le bassin parisien et sur les bords de la Loire depuis la fin du 1er millénaire et qui allait par la suite devenir le français. L’unification de la langue au sein du royaume allait faciliter par la suite la centralisation du pouvoir. Bien avant l’ordonnance, dans le Midi du royaume, le Parlement de Toulouse, en 1448, avait décidé de son propre chef d’employer dans son administration non pas la langue d’oc comme elle était pratiquée dans cette grande région mais la langue d’oïl. Alors même que cette langue n’était pas comprise et parlée par les élites et le peuple occitans. Il y avait certainement, de la part de ces élites méridionales, éloignées de Paris, une volonté de se rapprocher du pouvoir central. 

    Mais que contient cette ordonnance ? Elle ne comportait pas moins de 192 articles. Elle fut rédigée par le chancelier Guillaume Poyet, avocat et membre du Conseil privé du roi, l’ordonnance prit dans un premier temps le nom de Guillemine, tiré du prénom de son rédacteur ? Deux transformations importantes en découlent : premièrement celle qui allait faire du français la langue officielle du droit et de l’administration, à la place du latin. D’ailleurs les articles 110 et 111 de l’ordonnance n’ont jamais été abrogés, ils ont court encore aujourd’hui. L’ordonnance de Villers-Cotterêts permit aussi la naissance de ce qu’on nommera plus tard l’état civil. Dans l’article 111, il est clairement établi que le pouvoir souhaitait être compris par tous :

    « Et pour ce que telles choses sont souvent advenues sur l’intelligence des mots latins contenus dans lesdits arrêts, nous voulons dorénavant que tous arrêts, ensemble toutes autres procédures, soit de nos cours souveraines et autres subalternes et inférieures, soit de registres, enquêtes, contrats, commissions, sentences, testaments, et autres quelconques actes et exploits de justice, ou qui en dépendent, soient prononcés, enregistrés et délivrés aux parties, en langage maternel et non autrement ».

    Il est utile de préciser que le but était de se faire comprendre par l’ensemble de la population, c’est la raison pour laquelle les textes législatifs, en plus d’être rédigés en français, étaient également rédigés dans les autres langues régionales puisqu’au XVIe siècle, seulement ¼ des Français parlait la langue d’oïl, à savoir la langue du roi. 

    Deuxièmement, l’ordonnance prévoit d’enregistrer par écrit, par l’intermédiaire des curés des paroisses, les baptêmes, autrement dit les naissances puisqu’à cette époque chaque enfant était baptisé dès la naissance. L’ordonnance sera enrichie quelques décennies plus tard par les ordonnances de Blois en 1579 et de Saint-Germain-en-Laye en 1667 qui, elles, exigeront en plus que soient enregistrés les décès et les mariages. L’ordonnance sera entérinée définitivement au Parlement de Paris par le roi de France François Ier le 6 septembre 1539. Tous les Français relevant du roi de France étaient concernés par l’ordonnance exceptés la communauté juive alors minoritaire, et les personnes excommuniées. Seule l’Alsace, protégée par les traités de Westphalie et de Nimègue, ne sera pas concernée par l’ordonnance de Villers-Cotterêts. Les curés continueront alors à rédiger leurs actes en latin quand les protestants le feront en allemand.

    Au XVIIe siècle, sous Louis XIV, la France rayonne à travers le monde et devient la plus grande puissance militaire et démographique d’Europe. Par conséquent, la langue française s’impose comme la langue de la diplomatie et de l’aristocratie. À partir de cette époque, tous les traités internationaux sont rédigés en français. 

    Il faudra attendre la Révolution de 1789 pour que la langue française soit déclarée langue de la nation toute entière. Progressivement, grâce à l’expansion coloniale, elle sera répandue en Afrique et en Asie pour disparaître progressivement au profit d’une langue parlée par une nation émergente : l’anglais.